• Première fugue

      Ce jour-là,ce fut comme un coup de tonnerre dans un ciel bleu,un tremblement de terre soudain ou la nuit qui vous envahit en plein midi.
      Ce jour-là,tu n'es pas rentré du lycée !
      Les heures se sont écoulées,une à une,désespérées
    et tu ne rentrais toujours pas...
     

    J'ai appris que vous étiez plusieurs dans ta classe , à avoir décidé de partir, que les autres s'étaient dégonflés parce qu'il faisait trop froid...Seule une fille,complètement désorientée,qui projetait d'aller voler des chevaux pour s'envoler à l'étranger restait déterminée à partir et toi, tu avais décidé de l'accompagner...à la grande surprise de tes camarades car aucun lien ne t'unissait à elle...
      Je ne comprenais pas, je te pensais en danger, je ne savais pas quoi faire...On avait fait une déclaration à la police mais pour des adolescents, ils ne se mettent en recherche qu'au bout de plusieurs jours, la plupart des jeunes revenant d'eux-mêmes au domicile familial  ...Il fallait pourtant faire quelque chose...mais où te chercher?
      Cette première fugue,ce fut comme si la terre s'arrêtait de tourner....
      J'étais dans la stupeur la plus absolue...


      Toi, le petit dernier, qui avait eu tant de peine à vouloir grandir, toi qui avait toujours compté sur tes parents, sur ton frère et tes soeurs, dès qu'il y avait le moindre problème, tu étais part,i sans prévenir, sans savoir où aller...
      Tu attendais peut-être que quelque chose interrompe cette vie insipide que tu jugeais être la tienne..
      Depuis quelques mois, tu t'étais décidé à sortir parfois , avec tes copains, les samedis soir..puis tu avais cessé,je ne savais s'il fallait m'en réjouir ou m'en inquiéter...Et toi qui jusqu'alors avait si peu quitté le domicile familial,tu avais décidé de partir,sans savoir où aller...mais l'avais-tu vraiment décidé?
      Tes camarades avaient dû fanfaronner, dire que vous alliez tous partir, faire la fête,vous délivrer de ses parents et de ses profs ennuyeux qui vous empêchaient de vivre avec leurs exigences stupides. Et tu avais été très désappointé quand ils avaient décidé de renoncer à cette escapade festive...Qu'as-tu pensé à ce moment -là? Qu'est-ce qui t'a décidé à partir?
      Etais-tu si fort attaché à moi que tu éprouves le besoin de mettre une distance pour  trouver ton autonomie? Et il te fallait partir?
      Ai-je voulu te voir grandir trop vite et n'ai-je pas su comprendre qu'à toi, il te fallait un peu plus de temps qu'aux autres et que de toi-même, tu te détacherais de moi quand tu serais un peu moins fragile, quand tu aurais compris que l'amour ne peut pas être fusionnel?
      Désirais-tu obliger ton père à te mettre des limites? Tes fugues étaient-elles un appel que vainement tu lui lançais ?
      Pour ta toute dernière fugue,c'est avec son anorak que tu es parti,comme si tu avais voulu l'emmener avec toi dans ton errance et  c'est avec cet anorak que l'on t'a enterré.


  • Commentaires

    1
    Samedi 15 Décembre 2007 à 10:28
    oui j'ai l'impression de commencer à le connaître ton fils, j'en ai les larmes aux yeux, j'y vois aussi toutes mes erreurs de compréhension de mes propres enfants. La fuite c'est ce qui reste quand on a tout épuisé. Pourquoi tant d'amour maladroit en nous n'a-t-il pas su les retenirou les aider à s'envoler ?
    2
    Samedi 15 Décembre 2007 à 12:05
    Comme l'écrivait hier aussi une de tes lectrices, je te lis aussi tous les jours mais souvent j'ai du mal à te répondre "sainement" Je sais qu'il ne s'agit pas de pleurer avec toi mais de partager, de t'écouter( on a vraiment l'impression de t'entendre ) et d'être là avec toi et avec ton enfant. Je t'embrasse
    3
    MP
    Samedi 15 Décembre 2007 à 16:54
    Une de ce que j'appelle mes "croyance" : en tant que maman, on fait ce qu'on peut, avec ce qu'on est, avec ce qu'on sait. On essaie au mieux. cela m'évite parfois une trop lourde culpabilité face à la fragilité des mes enfants. Face aux tentatives de fugue (dans mon cas, les gendarmes on déclenché les recherches au bout de 3h suivant le signalement, mais que j'ai eu peur...)Mais, bon sang, oh combien je comprends. Et combien ce que tu écris me touche. Poéteusement
    4
    Samedi 15 Décembre 2007 à 20:11
    Quelle souffrance tu nous racontes-là, Gazou. On est tellement démunie devant nos enfants à problèmes et notre coeur saigne à chaque incartade, à chaque chamboulement. Sa fragilité n'est pas devenue force, il s'est laissé porter trop loin, trop tôt. Bises à toi qui partage tant avec nous.
    5
    Samedi 15 Décembre 2007 à 23:31
    Nous vivons hélas dans un monde qui nous culpabilise trop et qui veut aussi nous assurer contre tout ! Comme le dit Mp, on fait avec ce que l'on est, ce que la vie nous a appris et on n'est pas tout puissants, omniscients... Ce que tu écris me touche aussi énormément ! C'est si fragile un enfant et nous tremblons encore pour eux ,même quand ils sont grands ! Bisous
    6
    Mardi 18 Décembre 2007 à 18:34
    Une fugue, des fois, ce n'est pas programmé. on a juste envie d'errer de se perdre, de surtout de ne pas redevenir ce qu'on est. au fil des récits, je saisis tes douleurs et les siennes.
    7
    Mercredi 19 Décembre 2007 à 21:27
    Je me souviens que ma soeur avait fugué et que nous la cherchions partout - elle n'étais pas loin pourtant ; c'est papa qui sur une inspiration a ouvert la porte, et l'a vu seule dans l'escalier, tel un oiseau revenu mais peut être prêt à repartir. bisous chaleureux
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