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     AUTOPORTRAIT EN AUTOMNE de RENE DEPESTRE

     

    Frère des animaux et des arbres innocents c'est au poète d'annoncer le nouvel espoir et la beauté rendus à l'en-marche des hommes.

    L'homme qui aime la vie a le sang relié au feu, au fleuve, au roc et à l'azur du ciel.

    L'époque - féroce et sensuelle - s'avance vers lui pour lui dire :
    Ton atelier va à la déroute !

    libre à vous d'écouter mon histoire sans y croire :

    partout où j'ai été j'ai tué mes huîtres

    pour payer avec des poèmes les dettes du
    Sud.

    J'ai connu au
    Nord le goût amer de la vie

    j'ai vu l'Ouest brûler en moi tous ses vaisseaux

    tandis que l'Est enfonçait ses griffes dans ma gorge.

    Partout ma charrue a été mise à l'épreuve.

    Où aller maintenant ?
    Où porter mes outils ?

    une fois de plus : blessé à chaque porte où je frappe,

    gavé de soleil au flanc de mes soirs de pluie,

    je me laisse pousser dans le pin maritime

    qui sert de bateau à la dérive de mes songes.

     





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    Balade aérienne

     

    Automne
    Le bruit des couleurs
    Sous la pluie.

    Comme il est étonnant
    Celui qui dans ce monde
    Ne s’émerveille pas.

    Aussi, avec légèreté,
    À travers les flaques,
    Marcher sur les nuages.

     

                                                            Stéphen Moysan (Entre deux solstices)

     


    Stéphen Moysan : Né à Épinay-sur-Seine, le 10 décembre 1979

    Dans les années 2000, Il s’implique politiquement et sympathise avec le mouvement altermondialiste. Il craint les dérives du néo-capitalisme et ses répercussions sur l’écologie et milite contre l’extrême droite. Au sein de son école, il découvre également la poésie, l’écriture, le théâtre, la peinture, et décide de consacrer sa vie aux deux premiers. Cela ne l’empêche pas d’obtenir son diplôme, et d’être pris dans le département de recherche de l’école en acoustique de vibrations. Il ne poursuivra cependant pas dans cette voie et choisit de faire du soutien scolaire pour des jeunes en difficulté de Seine Saint-Denis. Face à la médiocrité du projet qui l’embauche, il se retire et enseigne les mathématiques et la physique à Paris, d’abord en Bac puis en BTS Fluide, environnement, énergie.

    En 2010, bien que son écriture soit encore en rimes, il commence à aborder un nouveau genre inspiré des Haïkus. Mais trois ans plus tard, il est frappé par un AVC. Il reste 5 jours inconscient et se réveille avec une aphasie sévère. A l’hôpital, il vit une bouffée délirante mystique qui l’envoie en psychiatrie. Il en sort rapidement mais est profondément marqué. Ses soins à la Salpêtrière dureront un an et après 24 mois d’efforts et de rééducation, il peut de nouveau parler et enseigner. Il réapprend l’écriture puis la poésie. Il accentue alors ses recherches.

    Son site créé avec son ami Mathieu Jacomy connaît un réel succès et sa poésie est souvent reprise sur le web. Il devient un des poètes du 21ème siècle à découvrir.

     


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    Allo l'été, ici l'automne.

     

    Ce soir une voix téléphone

    Allo ! qui est à l'appareil?

    Allo ! l'été, ici l'automne

    Quand veux-tu que je t'émerveille?

     

    Cette année, tu esen avance...

    Les blés ici sont moissonnés !

    Et bien finies sont les vacances

    Peux-tu venir en fin d'année?

     

    Ah ! non, pas possible l'hiver

    veut présenter sa collection

    de blanc et sa mode est sévère

    Grand caleçon pour grand glaçon.

     

    Il veut écouler ses frimas

    ses cristaux, ses coupons de vent

    il devient vieux, un peu gaga

    et fait attendre le printemps.

     

    Allo ! Allo ! mon vieux rouquin

    n'oublie pas tes bijoux en or

    Moi l'été je m'en vais demain

    avec le ciel qui m'aime encore.

                        

                               Elie Viné (L'herbier des jours)

    Elie Viné fut conseiller d'administration des services universitaires, ce qui ne l'empêcha pas de s'intéresser au théâtre et d'écrire des poèmes


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  • L’ÉCOLE PUBLIQUE

    À Saint-Jean-Brévelay notre école publique
    Était petite et très, très pauvre
    : des carreaux
    Manquaient et pour finir c’est qu’il en manquait trop
    Pour qu’on mette partout du carton par applique,

    Car il faut voir bien clair lorsque le maître explique.
    Alors le vent soufflait par tous ces soupiraux
    Et nous avons eu froid souvent sous nos sarraus.
    Par surcroît le plancher était épisodique

    Et l’on sait qu’avec l’eau du toit la terre fait
    Des espèces de lacs boueux d’un bel effet.
    — Pourtant j’ai bien appris dans cette pauvre école:

    Orthographe, calcul, histoire des Français,
    Le quatorze juillet, Valmy, la Carmagnole,
    Le progrès, ses reculs, et, toujours, son succès.

    20 février 1954

    GUILLEVIC, Trente et un Sonnets (Gallimard) (1907-1997)

     


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  • Si c'était ton fils
    Tu remplirais la mer de navires
    Et de n'importe quel drapeau.

    Tu voudrais que tous ensemble
    À des millions
    Ils fassent un pont.
    Pour le faire passer.

    Attentionné,
    Tu ne le laisserais jamais seul.
    Tu ferais de l'ombre
    Si c'était ton fils...

    Si c'était ton fils
    Tu remplirais la mer de navires
    Et de n'importe quel drapeau.

    Tu voudrais que tous ensemble
    À des millions
    Ils fassent un pont.
    Pour le faire passer.

    Attentionné,
    Tu ne le laisserais jamais seul.
    Tu ferais de l'ombre
    Pour ne pas que brûlent ses yeux,
    Le couvrir
    Pour ne pas qu'il se mouille,
    Des éclaboussures d'eau salée.

    Si c'était ton fils, tu te jetterais à la mer,
    Tu tuerais le pêcheur qui ne prête pas le bateau,
    Crierais pour demander de l'aide,
    Aux portes des gouvernements qui se ferment
    Pour revendiquer la vie.

    Si c'était ton fils aujourd'hui, tu serais en deuil,
    Tu détesterais le monde, tu détesterais les ports.
    Pleins de ces vaisseaux immobiles.
    Tu détesterais ceux qui les gardent inaccessibles.
    A cause de qui les cris
    ont toujours le goût l'eau de mer.

    Si c'était ton fils, tu les appellerais.
    Lâches inhumains, parce qu'ils le sont.
    Ils devraient t'arrêter, te garder, te bloquer,
    Tu voudrais leur casser la gueule,
    Car nous sommes tous dans la même mer.

    Mais ne t'inquiète pas, dans ta maison tiède.
    Ce n'est pas ton fils, ce n'est pas ton fils.
    Tu peux dormir tranquille
    Et surtout serein.
    Ce n'est pas ton fils.

    Ce n'est qu'un fils de l'humanité perdue,
    De l'humanité sale, qui ne fait pas de bruit.

    Ce n'est pas ton fils, ce n'est pas ton fils.
    Dors bien, bien sûr.
    Ce n'est pas le tien.

    Sergio Guttilla


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