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    J'ai découvert récemment les très beaux portraits de François Guiguet (1860-1937)

     

    Je suis restée longuement devant le tableau ci-dessus

    Elles voudraient bien savoir  les deux amies qui sont sur la gauche de la maman   qui tient le bébé à la robe blanche....

    Elles la harcèlent de questions

    Hésite-elle ou est-elle fermement décidée à ne rien dire ? Je ne sais...Je la sens trop accablée pour pouvoir parler  Et elle sait que garder le silence est parfois la meilleure façon de ne pas voir ses paroles travesties...

    Je crois qu'elle a choisi de se taire et ses compagnes n'auront qu'à inventer l'histoire qui ne leur a pas été racontée....

    Sa voisine de droite s'absorbe dans son ouvrage...mais elle n'en perd pas une miette..du dialogue muet qui s'est instauré  entre ses voisines...Elle sait, elle aussi que le silence , parfois,vaut mieux que les paroles

     

    Et moi, je me demande encore pourquoi cette femme m'intrigue autant, pourquoi elle m'attire...

    Peut-être que je me reconnais en elle et que cette scène m'en rappelle d'autres où j'ai été moi-même soumise au feu de questions indiscrètes!


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  •   Hier, je croyais l'histoire achevée, tout comme le tableau.

      J'ai failli inscrire le mot"fin" mais ça me semblait si évident que c'était inutile de 'écrire.

      Mais voilà que les personnages m'ont poursuivie et je peine à les quitter.

     

      Pour la jeune fille,cela va bien, je la vois prendre son envol..La transformation a été si fulgurante qu'il est impossible qu'il en soit autrement...Certes, il y aura des moments où elle se sentira de nouveau perdue, en détresse mais il lui suffira de repenser à son portrait, à ce tableau qu'elle n'a même pas besoin de regarder tant il est inscrit en elle au plus profond pour que le courage et la confiance lui reviennent. Et puis, elle sait qu'elle peut revenir voir le peintre si  elle en ressent le besoin, qu'il sera toujours prêt à l'écouter, à la conseiller..Ils ont pourtant échanger peu de paroles jusqu'à présent..mais elle sait cela. Et pour la première fois elle pense que demain peut lui réserver de bonnes surprises et elle est avide de les connaître.

      Mais lui, le peintre, pour lui aussi, c'est une première fois, la première fois qu'il fusionne aussi intensément avec son modèle, la première fois que, par son art, il permet à quelqu'un de devenir un peu plus lui-même...Et il en est fortement  ému, il en est même bouleversé...Il comprend que c'est cela qu'il cherchait...

      Et désormais ,il veut continuer à faire des portraits. Il trouvera des êtres qui recèlent un secret au fond d'eux-mêmes, un secret que lui se sentira apte à dévoiler et ainsi il les aidera à grandir, à devenir pleinement eux-mêmes...Et agissant ainsi, il trouvera lui-même sa vraie dimension. ..Et c'est elle, celle qui se croyait inutile qui lui a permis de trouver ce chemin où il vient de faire ses premirs pas...Et il en est émerveillé et reconnaissant..Il va pouvoir se donner totalement à son art.


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  •   Il lui dit que le tableau est bientôt fini mais il préfère qu'elle ne le voit que lorsqu'il sera tout à fait achevé.

    Elle reprend la pose docile, lisse, immobile...Elle remarque bien que le pinceau du peintre ne s'active guère : une petite retouche de ci, de là mais il semble seulement la regarder, elle et le tableau...A la fin de la séance, il lui demande de  venir voir. Il a fait du mieux qu'il a pu, lui dit-il, et il ne peut rien rien ajouter.

      Elle s'approche, elle regarde et reste interdite...

      Le peintre s'inquiète : que se passe-t-il ?

      -  Elle a pris mon visage,dit-elle, comment a-t-elle fait?

      - Mais ce n'est pas elle, répond le peintre, c'est vous....Regardez bien!

      Elle le regarde incrédule...Il a pourtant l'air sincère. Il ne se moque pas d'elle, elle peut le croire...

      Alors les larmes coulent sur son visage immobile..Une grande joie l'inonde...Elle est  ainsi....Elle sourit....Elle sourit à elle-même, elle sourit au peintre , elle sourit à la vie....Elle ne se sent plus exclue  et désarmée...Désormais, elle va tout faire pour rejoindre cette fille là qui est sur le tableau et  dont elle se sentait tout à l'heure si éloignée.

      De même que les feuilles du peuplier qui dansent dans le vent nous en révèlent la beauté, de même ce peintre a su donner souffle et vie à cette enfant pas encore née, à cette enfant cachée dans un corps de femme qui ignorait tout d'ele-même et de sa force .


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  •   D'ordinaire,face à ses modèles, il oubliait très vite leur identité pour ne voir que  la couleur de la peau, le mouvement de la chevelure, la courbe du nez, l'ovale du visage...pour ne voir finalement qu'un ensemble de couleurs et de formes...Mais aujourd'hui c'est exactement l'inverse qui a lieu...Il lui faut absolument comprendre cette jeune femme, saisir qui elle est pour pouvoir la peindre.

      Mais nulle inquiètude en lui...La patience infinie qu'il découvre chez son modèle l'apaise, il sait qu'elle acceptera autant de séances qu'il lui sera nécessaire...Et ce qu'il a pressenti en elle, dès le premier regard, il ne peut l'oublier...Un visage, c'est une constante métamorphose...A lui de rassembler en une seule image les impressions fugitives qui naissent et disparaissent...A lui d'en faire l'unité, de les lui restituer, de les harmoniser.

      Toutes les après-midi, elle est là fidèle au rendez-vous. Et chaque jour, il la découvre nouvelle , différente...Une petite flamme s'allume dans ses yeux....

      Un jour, le téléphone ayant sonné au moment où elle arrivait, il la fait attendre. Tout en répondant à son interlocuteur, il la regarde discrètement...et il a un sourire aux lèvres quand il la voit s'impatienter...Enfin, elle sort de la passivité...Il s'excuse, retourne à ses pinceaux....Pour la première fois, il la voit s'intéresser à ses gestes,  porter sur lui un regard interrogateur....

      Il lui dit de ne pas venir le lendemain car il doit s'absenter...Il la sent inquiète, un peu déçue. Il la rassure, il ne s'absente que pour la journée. Lorsqu'il revient le jour suivant, il la découvre moins transparente, un peu plus présente...Elle ose même lui demander où en est le tableau...


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  • Hier j'ai fait paraître un texte "Elle était sans travail" et plusieurs personnes m'ont dit attendre la suite....J'ai été étonnée...C 'est un texte que j'ai écrit  depuis plusieurs années...Et je ne m'inquiètais pas de la suite...J'avais surpris cet instantané et cela me suffisait...Et maintenant,je me pose la question moi aussi : que s'est-il passé ensuite ? Mais il est difficile de continuer un texte quand on n'est plus dans le même état intérieur...Je vous livre quand même ce qui est venu, et si vous avez des idées pour la suite, n'hésitez pas

     

    C'est certain, l'horizon s'ouvre devant elle...

    Enfin, elle peut être utile à quelqu'un,

    Enfin elle n'est pas exclue,

    Enfin elle sort de ce no man's land interminable qui était sa vie.

    Enfin quelqu'un semble la considérer comme  si elle était comme les autres.

     

    Quelle surprise heureuse ce regard joyeux qui se pose sur elle !

    C'est comme si le regard du peintre lui donnait la vie !

    Un jour nouveau commence.

    Une porte s'ouvre et elle avance.

    Elle n'a rien à perdre.

    Enfin sortir de cette non-vie qui a été son lot jusqu'alors.

     

    Le peintre a ouvert la porte

    "C'est exactement le modèle dont je rêve en ce moment, c'st ce regard-là que je veux capter" a-t-il pensé en la voyant.

    Quelle chance ! Elle vient justement pour la petite annonce qu'il a mis dans le journal.

     

    Soudain, il craint qu'elle ne change d'idée...Elle semble si perdue, si peu assurée.

    Alors il lui propose de commencer tout de suite la séance de pose. Elle accepte volontiers et s'installe...Rester sans bouger lui semble parfaitement naturel, ne lui demande aucun effort.

    Il prend ses pinceaux..Le temps s'arrête...Il veut saisir ce que ce regard dévoile et cache tout à la fois...Ce qui affleure par instants sur ce visage juvénile et innocent...

    Il la trouve très séduisante et pourtant il sent bien que ce mot-là lui est complètement étranger...C'est cette façon d'être là tout en n'y étant pas qui l'auréole de mystère...

    Comme Picasso, il s'interroge : " Faut-il peindre ce qu'il ya sur un visage, ce qu'il y a dans un visage ou ce qui se cache derrière un visage?"

    Soudain, il sait pourquoi il doit peindre ce visage : s'il parvient à saisir ce qui se cache derrière ..il va la révèler à elle-même, il va la sauver de cette errance où elle risque de se perdre...Il faut absolument qu'il y parvienne

     


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