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Emerveillement
J'ai été émerveillée en lisant ce texte
EMERVEILLEMENT de Matthieu Ricard
26 Octobre 2019
Ma participation au livre EMERVEILLEMENT de Matthieu Ricard.
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Lorsque Matthieu m’a proposé d’écrire sur l’émerveillement, un instant la tasse de thé que je tenais a perdu du poids. Une réflexion m’est immédiatement venue à l’esprit et je l’ai serrée contre mon cœur : on ne peut pas écrire sur l’émerveillement, on ne peut qu’écrire avec lui afin qu’il devienne contagieux !
Depuis un demi-siècle, mes yeux ne laissent plus entrer la lumière, et pourtant cette proposition d’écrire sur l’émerveillement – même si dans cet ouvrage le déclencheur semble être strictement visuel – ne m’a pas déstabilisé. Loin de l’accueillir comme un défi, je l’ai entendue telle une invitation à la complicité.
Lors de mon entrevue avec Matthieu, la tranquillité de sa voix, le poids de la tasse entre mes doigts, le goût du thé, tout était réuni pour que je dise « oui » à sa proposition ; en toute confiance, un « oui » a donc éclos sur mes lèvres. Dans l’enthousiasme et la beauté du moment partagé, la gratitude m’a semblé le plus beau des jardins pour que croissent les graines de mots et que fleurisse l’émerveillement.
Et comme quelquefois il m’est offert de surprendre le langage des oiseaux, j’ai entendu dans le verbe émerveiller : aimer et veiller.
Même si, éthylique, il titubait devant moi, je ne fouillerais pas dans les poches du destin. Connaître l’avenir serait, à coup sûr, passer à côté de la possibilité de s’émerveiller, verbe dont la conjugaison ne peut se faire qu’au présent.
Émerveillement, abrupt rayon de soleil sur la glace de notre indifférence !
Quand l’émerveillement fluidifie la glace de notre torpeur, créant une alchimie entre temps et espace, l’objet vu, entendu, senti — photos, paysages, musiques, fleurs — perd le statut d’objectivité. L’observateur, lui aussi, vacille, fond. Une bourrasque de jubilation saisit alors objet et sujet, les accordant à un diapason invisible.
Révélation, communion, unité de la Lune et de son reflet, du cri et de l’écho, d’un paysage et de sa photo.
L’émerveillement est à l’amour ce que le vent est aux cordes tendues de la harpe.
Il me vient alors à l’esprit cette histoire : Un puissant nabab et un pauvre paysan avaient chacun un enfant. Le puissant seigneur monta avec son fils en haut de la plus haute colline. Il lui montra le paysage en contrebas et lui dit avec orgueil :
— Regarde, mon fils ! Un jour, tout cela sera à toi, le jour où tu me succéderas.
D’un geste ample, il désigna rizières, temples, maisons, étangs, et même les gens qui travaillaient dans les champs. Le fils ressentit alors une grande exaltation, une ivresse de puissance, un bonheur intense. Mais tandis qu’il redescendait prudemment de la colline, ce bonheur fut perturbé par des pensées de peurs : et si son père demain changeait d’avis ? Et si des intrigants prenaient le pouvoir ? Et si… Et si…
Pendant ce temps, le paysan pauvre montait tranquillement avec sa fille sur l’autre versant de la même colline. Arrivé en ligne de crête, il lui murmura, une larme de gratitude coulant sur sa joue :
— Regarde, ma fille. Regarde !
Debout et en silence devant le paysage grandiose, l’enfant, attentive aux sons qui montaient de la vallée, aux arômes, aux couleurs, au moindre souffle de la brise, goûta alors à l’émerveillement simple, celui qui réenchante le monde.
L’émerveillement exprime avec gratitude notre impossibilité à comprendre le monde, nous faisant passer comme le disait un ami cher « de l’ignorance triste à l’ignorance joyeuse. »
Selon moi, la nature et l’art, sont les moyens inventés par la vie pour nous faire réaliser notre rôle de co-créateur.
Mais seule l’eau transparente de l’attention
Dit l’émerveillement et réveille l’inspiration.
Émerveillé comme Mozart écrivant son Requiem
Nu, je me suis alors offert au courant
La vie m’a fait un croc-en-jambe en criant je t’aime.
Eau, soleil, air, vous êtes devenus mon visage, mes vrais parents.
Les images de Matthieu Ricard sont une invitation à l’émerveillement ; regardons-les le cœur grand ouvert, comme la fille du paysan de l’Inde !
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Commentaires
" L’émerveillement exprime avec gratitude notre impossibilité à comprendre le monde, nous faisant passer comme le disait un ami cher « de l’ignorance triste à l’ignorance joyeuse. » "
Voilà une merveilleuse (si je puis dire) définition de l'émerveillement !
Les photos sont magnifiques Gazou, et ce livre est une excellente idée de cadeau.
Bises et bonne soirée
Contente de voir Alexandre Jolien sur la photo.
BisesMa fille me l'a offert à Noël . Merci pour ce passage d'un texte magnifique et émouvant.
Douce soirée Gazou
C'est extrêmement bien écrit et si émouvant, je ne connaissais pas cet auteur je vais tâcher de me procurer ce livre, merci
L'émerveillement fait bouillonner notre cœur, fait pétiller nos yeux , nous entraîne dans un tourbillon de joie et de gratitude !
s'émerveiller, se sentir bien, aimer, voir et entendre afin de ressentir... et "être" !
surtout, ne pas passer à côté !
amitié .
Tant que nous sommes capables de nous émerveiller, la vie restera belle.
Merci pour tes partages, Gazou.
Bisous et douce journée.
Le sens de l'émerveillement (inné ou reçu, je ne sais) me paraît toujours lié à la part d'enfance qui reste logée en nous.
Par exemple devant la première neige de l'année qui tombe sur Bruxelles en ce moment, ce "velours de neige" comme écrit Michaux.L'émerveillement est si important, c'est la clé pour sortir de ce monde anxiogène. J'avais lu un texte sur l'émerveillement qui disait, si justement, que cela consiste à comprendre que tout est interdépendant que nous sommes tous reliés les uns aux autres, mais également avec tout le vivant, et, si on retrouvait cet état, tout ce qui nous entoure changerait...
Bon dimanche Gazou !
<style id="dynCom" type="text/css"></style> <style></style>J'ai vu son exposition de photos. Magnifiques. Oui, c'était cela l'émerveillement.
Bonne fin de dimanche.
Ce texte est bouleversant tant il est beau, c'est un met précieux, oh, du fond du cœur merci Gazou. Je vais suivre ton lien pour explorer le monde de cet homme. Douce journée à toi. brigitte
Coucou Gazou et merci bcp ! C'est déjà un émerveillement que de lire cet extrait ! Je vais aller sur le lien pour voir son blog... Bisous
Oui Gazou, tentons par tous les moyens de conserver notre capacité à nous émerveiller.
Merci pour cette référence.
Bonne fin de semaine.Bonjour Gazou,
Ne plus savoir s'émerveiller, n'est-ce pas être déjà un peu mort ? Une vie sans émerveillement, c'est tellement... triste (pas d'autre mot plus explicite pour le dire)
J'aime tellement ceci :
"L’émerveillement est à l’amour ce que le vent est aux cordes tendues de la harpe"
Méditons là-dessus.
Bon samedi.
Fabrice
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Je n'ai pas trop compris qui a écrit le livre avec Matthieu Ricard
C'est Jean-Pierre Brouillaud qui a écrit ce texte.
D'abord malvoyant, il est aveugle depuis l'âge de 16 ans.
C'est un écrivain voyageur, sa cécité ne l'a pas empêché de partir tout seul dans différents pays du monde.
Alexandre Jollien et Christophe André ont dû eux aussi participer au livre puisqu'on les voit sur la photo.
Si tu veux mieux connaître J P Brouillaud, tu peux aller sur son blog, j'aimis la référence , lui aussi est sur une
des photos.
Bonne soirée Azalaïs