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Elle ne parlait pas
Elle ne parlait pas.
Non, elle n'était pas muette
Simplement, elle avait choisi de se taire
Non pour accroître son mystère
Mais elle se méfiait.
Elle se méfiait des mots
des mots qui enfermaient
des mots qui étiquetaient
des mots qui sonnaient faux
des mots qui limitaient.
Elle voulait garder ouvert
tout le champ des possibles
Elle voulait l'impossible.
Un mur de silence lui déroba l'horizon
et pour sortir de sa prison
elle ne trouva qu'une seule issue
le CRI
Un cri sauvage et inarticulé
Qui de l'abîme dont il était venu
S'éleva dans les airsEt brisa le silence
Et pour guérir la blessure qui s'ouvrait,
Elle découvrit le baume des mots.
Les mots qui se pressaient,
se bousculaient, inquiets, étonnés...
Elle parla,elle respira,
elle découvrit la liberté
et quand elle eut épuisé
le trésor que les mots lui offraient
elle retourna au silence;
Non plus un silence morne et aphone
mais un, bruissant de signes
et ruisselant d'espérance.Et dans un va et vient fructueux
Elle enveloppa ses mots de silence.
Et du silence
jaillirent en transparence
des mots nouveaux.
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Commentaires
2FlorentinLundi 21 Mars 2016 à 14:11Les mots, on le sait, sont la meilleure et la pire des choses. Ils permettent d'échanger, mais peuvent aussi meurtrir. On devrait toujours faire attention quand on sort du silence. Les mots que l'on dit ne sont pas forcément ceux que l'autre a compris. Compliqué le langage ! Bien amicalement. A plus. Florentin
Ton poème est très beau et touche que l'on soit du genre silencieux ou du genre bavard.
A mon sens, on ne résout rien en demeurant silencieux, car alors on prend le grand risque de se méprendre sur l'autre, de ne pas se comprendre.
Je pense qu'il vaut mieux exprimer avec difficulté ses sentiments plutôt que de ne pas communiquer (avec des mots).
Bonne semaine Gazou
Les mots au mille visages :
les mots qui disent
les mots qui se taisent
les mots qui se bousculent
les mots qui apaisent
et le silence qui parle
au cœur des mots
je me souviens du cri : il déchire et fait souffrir.
Les mots sont incomplets, sont incompris mais ils nous sont essentiels.
Merci pour ce texte qui donne à réfléchir.
Le silence peut être enfermement ou liberté.
Bises et bonne semaine pascale.
un poème qui me touche beaucoup car je trouve que le silence est parfois plus fécond que tous ces mots qui se répètent en boucle et qui ne veulent plus rien rien dire. C'est drôle parce que ton texte répond à un texte que j'écris (que je n'arrive pas à terminer) où j'essaie justement de décrire cette sorte de détachement qui s'opère en moi, quelque chose qui me pousse à simplifier de plus en plus, à ne garder que l'essentiel, un peu comme quand on vide une maison et qu'il faut choisir, trier, se séparer de choses auxquelles on croyait tenir et qui finalement vous apparaissent comme des coquilles vides.
Cet après-midi je suis allée à ma séance de qi-gong où nous avons repris une méditation que j'adore et qui s'appelle "les mille mains du boudha" pendant laquelle nous sommes silencieux bien sûr mais où quelque chose d' incroyable circule entre nous ; on sort de là totalement régénéré , calme plein de sollicitude
C'est un poème de toute beauté, Gazou ! un grand coup de chapeau ! Les mots peuvent effectivement être bombes ou réconforts.... L'extrème besoin de savoir les manier avec d'infinies précautions... car on ne sait jamais comment ils sont compris, voire interprétés ?!
Pas facile quand les mots fuient et qu'il faille s'exprimer quand même !
Le Cri de Munch
https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Cri
Merci de tout cœur Gazou et bisous
Un magnifique poème où les mots et le silence sont complémentaires s'ils sont bien utilisés .
Bonne soirée Gazou
Vraiment ça sent le vécu tant c'est ... "criant" de vérité. Savoir ce qui a déclenché ce cri...
Je pense à ces femmes violées par leurs pères, frères, maris en te lisant.
Ton poème est splendide, Gazou.
Le silence est multiple, à nous de le rendre créateur aussi.
Passe une douce journée.
16lenez o ventMardi 29 Mars 2016 à 17:48
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Quel magnifique poème, Gazou !! Comme tu exprimes bien ce désarroi de l'âme tombée elle ne sait où et qui apprend doucement à s'accepter puis à reconnaître d'où elle vient ... !
Ce poème me touche profondément.
Je te remercie de nous l'avoir offert.